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Interview de Françoise Piqué Le Cun de Humanis : dynamiser sa politique de lutte contre la fraude

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En 2016, près d’un milliard de prestations santé ont été remboursées par Humanis. En considérant un taux projeté de 2,6% de fraudes potentielles sur les prestations santé, il se dessine un enjeu économique significatif. En outre, la généralisation du tiers payant et la dématérialisation des flux induit un accroissement du risque.

C’est pourquoi Humanis a décidé de se pencher sur les enjeux des abus et atypismes dans ses remboursements afin de garantir un paiement sécurisé et au juste prix. L’objectif, outre l’enrichissement de l’offre de services pour ses clients, est de mieux maitriser les remboursements, d’améliorer les équilibres techniques des contrats (le P/C, rapport Prestations/cotisations)  et de contribuer aussi à une amélioration de la marge d’assurance.

Françoise Piqué le Cun, Directrice Gestion du risque santé et prévoyance chez Humanis a accepté de faire un retour d’expérience sur ce projet, notamment sur sa collaboration avec Cegedim Insurance Solutions (IS), les résultats obtenus et les objectifs à venir pour enrichir ces actions de prévention des fraudes.

POURQUOI AVOIR CHOISI DE LUTTER CONTRE LA FRAUDE AUX COTES DE CEGEDIM IS ?

Après avoir rencontré plusieurs fournisseurs de solution du marché, nous avons choisi de travailler avec Cegedim IS pour plusieurs raisons :

  • Leader sur le marché, Cegedim IS traite aujourd’hui, à travers son opérateur de tiers-payant iSanté, 80% de nos remboursements, en particulier en optique.
  • Cegedim IS dispose d’une solution pratiquement clé en main, ce qui nous permettait d’agir sans supporter de lourds investissements chez Humanis.
  • La cellule fraude et les équipes de data scientists de Cegedim IS nous ont convaincu de leur expertise sur le sujet et de leur capacité à nous accompagner pour  atteindre nos objectifs.

Gage de rapidité et d’efficacité, Cegedim IS a su nous accompagner sur un terrain dont ils avaient la maîtrise, compte tenu de leur présence historique dans les relations avec les professionnels de santé.

QUELLES REPONSES AVEZ-VOUS TROUVÉES FACE A CETTE PROBLEMATIQUE DE LUTTE CONTRE LA FRAUDE ?

Aujourd’hui, la fraude est devenue un enjeu essentiel du tiers payant mais aussi de notre gestion directe.

Nous avons souhaité adopter une démarche pragmatique et progressive de co-construction et de « test and learn », qui est passée par une phase de pilote, organisée en 4 temps :

  • Cartographier et analyser, par des études a postériori sur nos remboursements, les pratiques des professionnels de santé, pour dégager des atypismes.
  • Renforcer les contrôles sur le conventionnement des professionnels de santé, ce qui est le cœur de métier d’iSanté, à qui nous avons délégué ce conventionnement depuis plusieurs années.
  • Instaurer des contrôles à priori sur le portail de prises en charge, selon les enseignements tirés de nos analyses a posteriori sur les atypismes, afin de freiner les pratiques d’optimisation de garantie et vérifier, par exemple, les adéquations entre le matériel et l’âge des bénéficiaires.
  • Elargir le périmètre des contrôles au-delà de l’optique, notamment sur l’audioprothèse et le dentaire.
  • Concrètement, l’année 2017 a été une année d’expérimentation, tournée principalement vers  la détection des dossiers à analyser, en vue d’une généralisation en  2018.

COMMENT VOYEZ-VOUS LA SUITE DU PROJET ?

Pour la suite du projet, nous allons procéder en 3 temps :

  • Mettre en place les procédures d’investigation des dossiers atypiques et approfondir le traitement des dossiers sous surveillance, en vue de  possibles contentieux avec les professionnels de santé. L’enjeu est de bien articuler  les tâches qui relèvent de iSanté et de la gestion Humanis dans ces opérations.
  • Réaliser le Suivi économique et le ROI de nos actions afin de pouvoir constater et valoriser les remboursements évités, et les mettre en adéquation avec les charges nouvelles occasionnées par ces nouvelles missions.
  • Etendre le périmètre de nos actions, notamment sur les segments sur lesquels iSanté a une activité de Tiers-Payant forte et où des contrôles a priori du règlement sont possibles, pour agir en amont et éviter des contentieux lourds et complexes avec les professionnels de santé.

QUELS SONT LES IMPACTS DE CE PROJET AU NIVEAU D’HUMANIS ?

Au niveau d’Humanis, le lancement de ce projet fraude a donné lieu à la mise en place d’un volet Accompagnement du changement pour les équipes internes. Concrètement, les impacts identifiés sont de  plusieurs natures :

  • S’approprier toutes les nouvelles opportunités qu’apportent les technologies de l’IA, dans le cadre de notre programme big data pour mieux connaitre les parcours de nos clients dans le  système de soins et les comportements des professionnels de santé.
  • Faire évoluer notre organisation interne, avec la création d’une cellule fraude dédiée, pour pouvoir répondre de manière efficace aux exigences de ces nouvelles missions.
  • Coordonner les différents périmètres d’intervention, depuis la dynamique lancée avec Cegedim sur le tiers payant, en particulier avec notre gestion directe mais aussi  les relations avec nos partenaires, comme notre plate-forme de gestion du risque Itelis ou nos délégataires de gestion.

QUELS OBSTACLES AVEZ-VOUS RENCONTRÉ ?

Nous touchons du doigt la difficulté de rajouter des missions nouvelles sur des équipes de gestion déjà très occupées. Ce travail d’analyse et d’investigation par nature chronophage, perturbe parfois le quotidien de nos gestionnaires, qui doivent aussi conserver une orientation client et garantir la qualité de service sur laquelle nous nous engageons. C’est pourquoi nous sommes en train de faire évoluer notre outil de gestion.

Pour éviter la dispersion, nous avons dû travailler sur un meilleur ciblage de nos actions, afin de privilégier celles qui consomment le moins de temps humain tout en ayant le plus de chance de succès et de ROI.

Enfin, nous avons passé beaucoup de temps à  cadrer notre programme sur le plan juridique, avec de nombreuses déclarations de nos traitements informatiques ou d’évolutions dans nos conventions avec les professionnels de santé, notamment en lien avec RGPD : un travail bâclé en amont nous aurait amené à prendre des risques en termes de conformité vis-à-vis de la règlementation,  ou à se lancer dans des contentieux coûteux, longs et sans véritable garantie de succès. Cette prise de risque n’était pas envisageable pour Humanis et  nous avons, de fait, consacrer beaucoup de temps à ces sujets au début du projet.

QUELLES SERAIENT VOS RECOMMANDATIONS POUR SE LANCER DANS UN PROJET TRAITANT DE LA FRAUDE ?

Avant de se lancer dans un projet relatif la fraude,  je pense qu’il faut être déterminé,  mais réaliste dans ses ambitions. Nous sommes déjà étonnés des enseignements et résultats que nous avons obtenus en si peu de temps, depuis juillet 2017. Les conseils que je donnerais sont les suivants :

  • Rester pragmatique et travailler dans la durée, de façon progressive, avec de bons ciblages
  • Constituer une équipe d’acteurs pluridisciplinaire(ex : représentants du juridique, de la conformité, des risques,  de la gestion, de la MOA etc.)
  • Expliquer les enjeux et nouveaux processus envisagés, convaincre les équipes internes, y compris les équipes commerciales, de l’intérêt des différentes actions engagées.
  • Veiller à maintenir une qualité de service et garder une orientation client, même dans ces sujets qui semblent a priori plus tournés vers la gestion et la régulation.

POUR FINIR, QUELS SONT LES CHIFFRES CLÉS RELATIFS A CE PROJET FRAUDE ?

Si l’on voulait résumer ces quelques mois de projet en quelques chiffres, ceux qui me viennent à l’esprit sont :

  • 156 opticiens contrôlés et en cours d’enquête
  • 7000 pièces justificatives réclamées depuis juin 2017
  • 36 opticiens déconventionnés
  • 350 K€ de remboursements évités sur les prises en charge optiques grâce aux mesures de contrôle à priori (extrapolation réalisée sur la base d’une année de remboursement)
  • 6 à 2,5 M€ de potentiel d’économies ou dépenses évitées évaluées par Cegedim IS en année pleine. Cette estimation concerne le périmètre actuel des contrôles en optique.

Pour avoir plus d’informations sur ce sujet, les équipes de Cegedim Insurance Solutions sont à votre disposition pour répondre à vos questions.

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